samedi, octobre 19, 2013

Luc Delfosse s'envole ?



Une chronique quelque peu ennuyeuse circule parmi mes amis et relations sur le gentil monde du rêve bleu qui aime tant nos données personnelles. Une chronique du Vif me rappelle toujours avec émotion pourquoi je regrette le Pourquoi pas d'antan et pourquoi j'aimerais que le Batia de Serge Poliart obtienne le succès qu'il mérite : une chronique du Vif me rappelle qu'un chroniqueur-éditorialiste-journaliste ne doit pas perturber le confort de lecture de son public cible afin de ne pas le dissuader de regarder la pub. Et normalement, c'est là que je devrais commencer à perdre quelques amis.

En gros, Luc Delfosse nous rappelle que le racisme, c'est mal, et même abject : il fallait sûrement une chronique pour s'en convaincre. Et de prendre appui sur quelques incidents médiatiques qui ont échauffé les esprits... Sur des déclarations politiques d'importance ? Que nenni, sur des déclarations d'un météorologue, de commentateurs sportifs, d'un président de chambre du commerce : le monde va cesser de tourner ! Rien sur la politique à l'encontre des demandeurs d'asile en notre plat pays, rien sur l'appellation "allochtone" qui se répand depuis longtemps en Flandre et à Bruxelles, rien sur le néo-communautarisme en vogue dans les partis qui part à la pêche électorale des voix des "allochtones", rien sur le regain du nationalisme qui s'épanche bien loin des médias mais s'ancre dans la rue. Non, parlons du temps qu'il fait, du foot et un peu de l'emploi : à la place de Luc Delfosse, je me poserais la question également du contexte de ces phrases souvent idiotes, parfois maladroites, tant elles sont significatives des préoccupations de certains de nos citoyens qui n'ont pas oublié d'être cons. 

Si l'analyse du discours médiatique livrée dans la chronique susnommée (un brin d'érotisme, ce mot m'évoque des plaisirs inavouables !) me semble assez pertinente, elle ne me paraît ni neuve ni complète : peut-être parce que l'exercice de la chronique oblige à se coller à l'actualité, telle une hémorroïde à son orifice de prédilection. Il me semble que Peter Sloterdijk, Michel Serres et même Debray avaient écrit des choses sur le sujet mais comme j'ai la flemme de retrouver la caisse pas encore déballée où devraient se trouver leurs ouvrages, je vous laisse chercher par vous-mêmes. 

Par contre, sa solution me rappelle fâcheusement la novlangue que redoutait Orwell dans 1984 ou les assauts du politiquement correct depuis la fin des années 80, constitutifs d'une langue de bois étrange dont le rapport à la réalité des faits me semble souvent très ténu. Et ce langage alternatif (l'équipe de Sarkozy parlait "d'éléments de langage") me semble aussi responsable de la xénophobie ambiante que le format très limité des nouveaux médias (140 signes pour twitter, est-ce assez pour penser ?) ou que le consensualisme (je néologe ?) des médias traditionnels. S'il faut assurément lutter contre la pensée du slogan, pourtant commune, qui peut établir ce qui reste permis ou ce qui ne le serait pas ? Ni  Luc Delfosse (beaucoup) ni moi (un peu moins quand même) n'avons de solution miracle parce que les mots ne traduisent qu'une partie de la pensée. Mais je persiste à penser qu'on ne gagne pas contre un adversaire en utilisant les stratégies auxquelles il s'attend. 

Terminons par une anecdote de mon quotidien qui, je le sais, intéresse le monde entier. Deux ciccios typiques de ma petite ville (ados italiens en training-baskets-casquette) causent dans le bus de ces "négres qu'on voit partout" et "qu'il y en a de plus en plus" et même "qu'ils sentent pas bon". Je les regarde se préparer à descendre lorsqu'ils tombent sur une dame, noire, qui se prépare à monter avec sa poussette dans le bus. Et ces deux grands dépendeurs d'andouilles de l'aider. Je laisse des lecteurs plus intelligents en tirer des conclusions : quant à moi, cela m'a fait sourire.   



    

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