samedi, janvier 06, 2007

Démolir Nisard

C'est le titre de l'excellent roman d'Eric Chevillard, paru lors de la rentrée passée. J'avoue mon enthousiasme : d'abord intrigué par ce règlement de compte avec un critique mort il y a plus d'un siècle, j'ai été emporté par les accès de rage du narrateur, couplés à la dérision de ses emportements.

Il y a des personnalités qui obsèdent parce que leur médiocrité s'impose sur la place publique. Ces gens, montés en épingle, osent nous affirmer leur conception inhibée de la vie : ainsi Nisard avait arrêté son jugement littéraire à Bossuet et affirmait une sorte de goût du sens commun, de celui qui débute et s'arrête souvent aux bornes de la connerie.

Ah, le bon sens ! Celui qui nous permet de juger en toute sérénité, croyons-nous, appuyés et soutenus par une majorité à qui le silence tient lieu d'intelligence. On penserait revoir la France d'en bas, chère à Raffarin. On penserait à ce plus petit commun dénominateur qui se trahit dans une certaine culture populaire : le culte de l'audience et des parts de marchés, la musique jetable, la littérature de boutiquier.

Evidemment, vous pourriez m'opposer le nombrilisme abscons, la culture artificielle du bobo en peine de métissage mal digéré ou encore l'élitisme forcené des littérateurs obscurs. Certes, c'est également une réalité : parce qu'une contestation qui se prend au sérieux sombre dans ses clichés, parce qu'un artiste qui s'admire n'a plus besoin que de son miroir, parce qu'aimer tout revient à n'aimer rien.

C'est à une philosophie de la complaisance que notre société nous invite, comme si nous devions y sacraliser l'assentiment, comme si le coup de gueule dhier devait susciter notre accord prochain. Même les réactions les plus agressives se récupèrent, quand elles n'expriment pas déjà de nouveaux clichés, véhiculés en masse au gré de réactions puériles. Et nombre de provocateurs ne font que renforcer cette idée du bon sens commun tant leur discours devient confus et inepte, tant le roi est, en fin de compte, nu.

Le plaisir du roman d'Eric Chevillard, c'est celui de l'indépendance de la littérature, celui de l'imagination qui s'enfuit loin des stéréotypes imposés, qui cultive la dérision et l'humour comme arme de distraction massive, qui se nourrit de ce qu'elle conteste mais ne cannibalise pas la bêtise avec la seule facilité de la contestation bon marché.

Le plaisir est une liberté exigeante : nous y choisisssons l'indépendance.

9 commentaires:

Anonyme a dit…

Ben mon vieux ! T'es pas facile à suivre...
Amitiés.

Ubu a dit…

Cher Rhadamanthe,

Tu dis cela parce que je ne suis pas une jolie fille : enfin, moi je les suis encore sans difficulté ;)

A bientôt ;)

Anonyme a dit…

Tu pourrais pas résumer ?

Mateusz a dit…

Me v'là dans ton nouveau chez toi virtuel ! Bon vent...

Ubu a dit…

Mon Cousin,
Je vous résumérai de vive voix : le roman ou mon propos ? ;)
Pour mon intervention, je dirai : "Mort aux cons". Ce qui est un vaste programme, vous en conviendrez :))

Cher Mateusz,
Je remercie le courant, même virtuel, qui t'a poussé sur mon nouveau rivage. ;))

Santé ! (enfin, au café vu l'heure !)

Anonyme a dit…

suis super heureuse de te revoir .,..

Anonyme a dit…

oh woua oh! le grand Ubu de retour? santé! (mais pas des pieds; oui oui, je sais, c'est pathétique)

Anonyme a dit…

Cher Ubu,
Je ne pouvais plus commenter chez toi, l'image "anti-spam" n'apparaissant pas...
Une amie a averti deux bloggeurs de Skynet via des commentaires.
J'espérais un effet "boule de neige" et que tu débrancherais ces dessins ridicules...
La terre a continué à tourner et les commentaires à fuser. J'en déduisis (à tort, semble-t-il) que j'étais le seul à avoir des problèmes (à cause de ma sécurité élevée).
Amitiés.

Ubu a dit…

Bonjour à tous ;))

Chère Zelda,
Diantre ! Que d'enthousiasme ! ;))

Chère Melle Bille,
Un peu pattes et tics, en effet :)))

Cher Armand,
J'ai connu exactement le même problème à cause de mon antivirus : en fait, c'est plutôt le système de Skynet qui n'est pas très adapté... D'où mon déménagement ici, plus que probablement définitif... ;)

A bientôt