vendredi, février 23, 2007

Une brève histoire du temps...

Je n'entamerai pas de réflexion sur l'ouvrage de Stephen Hawking, qui combine une éternité d'incompréhension à quelques instants de lecture : j'ai dû perdre quelques informations dans un trou noir croisé en cours de route. Je n'évoquerai pas non plus les conceptions du temps ou les manquements à la ponctualité qui me font répondre, au plus tôt, dans la semaine aux commentaires avisés de mes lecteurs préférés. En fait, lorsque je vois tout le temps que je vais économiser à ne pas vous parler d'un tas de chose, je me dis que je dois avoir cinq minutes pour vous causer du temps.

En fait, nous apprécions souvent un débat médiatisé selon l'équilibre du temps de parole : la matière est d'ailleurs légiférée en démocratie. Ainsi, chacun dispose pour son plaidoyer d'un temps de parole équilibré, qu'il en use pour de quelconques invectives, d'anodines imprécations ou des raisonnements tronqués. Il arrive aussi que les invectives soient savoureuses, les imprécations choisies et les raisonnements imparables : en général, le débat aura alors porté sur la conservation de la particule, celle que je préfère, dans les partouzes berrichonnes ou encore sur les incidences de l'arthrite du genou dans les prédictions météorologiques depuis douze siècles.

Bref, plus le sujet est ardu et supposé ennuyeux, plus son temps de traitement sera limité : il ne faudrait perdre ni spectateur ni auditeur. Pire encore, la culture du débat s'abreuve de brièveté, de sorte que se retrouvent sur un même plan, en un acouplement étrange, idées, raisonnements, croyances et superstitions : et le stéréotype de s'abreuver de cette force de l'instant, puisqu'il met autant de temps à être dit qu'à être compris.

Pierre Bourdieu
, la paix soit sur son style parfois lourdingue, avait déjà noté les problèmes de ce fameux équilibre du temps de parole suite à son passage dans l'émission de Daniel Schneidermann : il s'était senti piégé par le manque d'équilibre du plateau et par le manque de temps face à la tâche d'expliquer des notions complexes. Pierre Carles réalisa d'ailleurs un commentaire ravageur et partisan sur cette affaire, non sans mettre en valeur une proposition inquiétante : lutter contre un monopole supposé des uns par un contre-monopole des autres. Une position qui aboutit sans doute à cet observatoire des médias qui prône parfois un tel radicalisme, au nom de son parti pris, qu'il en devient caricatural.

Pourtant, pour moi qui balance entre une multitude de positions, un peu comme le Kamasoutriste ante coïtum, la question de fond continue à se poser. Nous vénérons les discours formatés : slogans publicitaires ou politiques (les seconds ne sont-ils plus qu'une expression particulière des premiers ?), musique prédécoupée, codes chiffrés, apocopes ou aphérèses, haïkus cuculs et autres oeuvrettes littéraires qui font les délices de la ménagerie des moins de cinquante. Notons que si les plus de cinquante n'y cèdent pas, c'est faute d'une mémoire vive suffisante. Notons aussi que, même si je balance entre deux âges, je n'ai aucune raison de me ménagerer l'antipathie des générations suivantes et précédentes : puisque je suis un con de mon âge, je leur adresse à toutes un message.

Les discours ne nous plaisent que lorsqu'ils sont brefs : leur charme aurait pu me séduire s'ils s'étaient démarqués de toute autorité et s'ils supposaient des systèmes de référence multiples. Pourtant, entre les clichés médiatiques et ceux de la contestation qui pète plus haut que son cul, j'avoue une identique peplexité, de celle qui saisit la tranche de jambon (ou de salami à l'ail) entre les deux pans de son sandwich : ne manquerait-il pas quelque assaisonnement à ces petits formats dont la crédibilité n'est assurée que par le ressassement ?

Et quelqu'un aurait-il des recettes de sandwiches sans pain ?

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Cher Ubu,
Seraient-ce les montres molles de Dali qui te font parler du temps de parole "élastique" des hauts-parleurs des médias?
A ce sujet, lors de débats télévisés, je crois que pour éviter les cloportes ("Trolls"® d'après Maître Eolas) vocaux, il serait utile de ne brancher le micro que quand ou a reçu la parole de la part du modérateur ou qu'une distribution de cartons jaunes calme les diarrhée-iques verbeux...
Autrefois, il y avait les babillages des jeunes filles en fleurs. Maintenant, grâce à l'égalité des sexes, il y a les bavardages des accapareurs de micros... Je préférais le bon vieux temps car le spectacle était plus gracieux.
Amitiés.

Ubu a dit…

Cher Armand,
Je pense plutôt qu'une solution serait que les journalistes préparent les débats et clouent le bec aux Trolls du grand écran :ce qui n'empêchera pas ces derniers de jouer les victimes...
Tu as raison : il manque de jeunes filles en fleurs en politique, ce qui me permettrait, si j'avais la télé, de couper le son pour apprécier les débats d'une autre manière ;)

A bientôt

Anonyme a dit…

coucou,
ravie de te retrouver
à plus
karine

Henri a dit…

la matière est d'ailleurs légiférée en démocratie. Ainsi, chacun dispose pour son plaidoyer d'un temps de parole équilibré,... ai-je lu et retenu... en plus je frissonne, Armand cite Eolas qui me semble être le pire de tous, usant comme esope de sa langue, bon, je voulais dire que c'est très subversif d'écrire que le temps est légiféré, l'expression verbale n'étant de bon usage qu'auprès d'une couche rare d'homo sapiens, la démocratie au temps limité n'est donc que la victoire des phraseurs qui ont eu un bon prof de réthorique, ...

bonne journée, semaine et qui sait, bien du temps devant toi ...

Anonyme a dit…

Cher Ubu,
Tu n'es pas malade, j'espère?
Tu as juste laissé un petit commentaire chez Paul... en février.
Depuis, rien!
Amitiés.

Anonyme a dit…

Oui, moi aussi je désepère...

Ubu a dit…

Chère Imagine,
Un mois après, je reviens ;)

Cher Henri,
Le temps de parole équilibré profite aux déséquilibrés, surtout : on ne retient que les traits, même pas les douces extravagances. Entre la qualité douteuse des témoignages "authentiques" et les charpentes de la langue de bois, je me sens comme Woody Woodpecker : picorons allègrement ;)

Cher Armand,
Les épidémies passent aussi par les écoles : rien de grave mais difficile de poster en éternuant continûment. Et puis je me suis fait l'effet d'être mononeuronal ces temps-ci ;)

Chère Barnabée,
Nous pourrions donc espérer un post pour cet après-midi, à condition que mes bergers aient rassemblé mes neurones éparpillés et qu'ils cessent de jouer à saute-bouton ;)

Merci à tous de votre intérêt et de votre sollicitude ;)

A très bientôt